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23 août 2005		artistes - chroniques - vivonzeureux! records - publications - listes - liens - contact
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Ils étaient sept, habillés de noir ou de sombre, qui sirotaient un pastis ou une bière à la terrasse du bar Le d'Artagnan. Quand la musique et les danses se sont arrêtées, ils se sont levés sans un mot et sont entrés en file indienne dans le bar, ils ont fait un signe au serveur et sont passés derrière le comptoir où une porte donne accès à la réserve.
Pour cette dernière soirée de la Fête de l'Europe de Vernet-les-Bains, le programme du mercredi 6 juillet 2005 annonçait des sardanes et des danses traditionnelles danoises, le Danemark étant l'invité d'honneur de l'année. Le soleil se couchait sans se presser sur la Place de la République, le point central de cette petite station thermale catalane, "Le paradis des Pyrénées", comme dit la publicité. La place était noire de monde, et les curistes et les touristes en avaient plein les yeux et les oreilles des danses danoises, et peut-être surtout des danseuses.
L'heure des sardanes approchait. Les danois faisaient petit à petit place aux danseurs et musiciens catalans sur la scène installée devant la Maison de la presse (Rappelons brièvement que la sardane est une danse catalane dérivée du contrepas, née entre Perpignan et Figueres, que les danseurs exécutent en cercle. La sardane, c'est aussi la musique qui accompagne cette danse, jouée par le cobla, un orchestre de onze instruments).
Le public faisait la queue aux différents bars pour se faire servir, en attendant que le spectacle reprenne. Personne n'avait fait attention aux hommes en noirs, qui étaient ressortis de l'arrière-bar à l'autre bout de la place avec des sacs et des caisses. En quelques minutes, ils avaient déballé leurs instruments sur la terrasse du d'Artagnan (petit piano, guitare, ukulélé, percussions, flageolet, trompette, trombone et clarinette) et entamaient une prestation acoustique hors-programme qui attira rapidement un public avide de faire la fête.
Il s'agissait bien sûr, vous l'avez deviné, du Bel Canto Orquestra, qui donna ce soir là un concert d'une vingtaine de minutes jusqu'à ce que les colles sardanistes et les coblas de la scène officielle soient prêts à prendre le relais. En cet été 2005, le Bel Canto Orquestra comprenait, autour de Pascal Comelade, Didier Banon, Jean-Paul Daydé, Patrick Félices, Gérard Meloux, Pep Pascual et Samy Surfer.
Dans l'esprit de la Fête de l'Europe, le répertoire du Bel Canto Orquestra ce soir-là fut uniquement composé de sardanes, et nous sommes heureux de pouvoir vous proposer un témoignage sonore de cette prestation unique du Bel Canto de retour au pays.
Les cinq titres joués ce soir-là comprennent deux sardanes composées par Pascal Comelade, "Sardane ralentie" (publiée en 1986 sur l'album "Bel canto") et la célèbre "Sardana dels desemparats" (dont on trouve trois versions, en 1993 sur "Traffic d'abstraction", en 1998 sur "L'argot du bruit" et en 2004 sur la compilation "La filosofia del plat combinat"). Le groupe a également joué ce soir-là deux sardanes traditionnelles arrangées et retitrées par Pascal Comelade, 'La sardanoise aux cheveux bleus" (la référence au thème de la soirée du 6 juillet semble évidente) et "Sardane à l'huile (Que fais-tu là ?)". Pour ce dernier titre, on peut penser qu'il y a un clin d'oeil au refrain du titre principal du 45 tours "4 gros tubes" du groupe rémois Les Combinaisons, sorti en 1987. C'est à confirmer, mais il est possible que Pascal Comelade ait entendu les Combinaisons jouer ce titre à Reims en 1986 lors du "Festival des traversins", le off des "Musiques de traverses" : le Bel Canto Orquestra était lui au programme officiel du festival cette année-là.
Le disque s'ouvre par une reprise de "Festa a Vernet-lès-Bans", composé par Juan Morata pour le 45 tours original des années 1950 "Sardanes à Vernet-les-Bains", qu'on trouvait justement en vente à l'époque à la maison de la presse Rajau de la Place de la République. Juan Morata est célèbre pour avoir popularisé la sardane dans les années 1950, à tel point que certains de ses airs furent utilisés en 1955 pour l'opérette "Les amours de Don Juan", dont Marcel Merkès et Paulette Merval étaient les vedettes.

Pol Dodu, août 2005.