A ce jour, j'ai eu la chance de voir Giant
Sand en concert trois fois, Calexico
trois fois également, Howe Gelb et OP8 (en l'absence de Howe) une fois chacun.
Au printemps 2000, les trois membres de Giant Sand
ont dû donner la migraine à leurs tourneurs respectifs pour
leur visite en Europe. J'avais fait la synthèse des concerts annoncés
pour ce fanzine, et c'était presque du délire : une semaine
Giant Sand, puis Calexico
à un bout de l'Europe et Howe en solo
à un autre, avant de se retrouver quelques jours et de se reséparer...
Mais surtout, en voyant Giant Sand en concert
en Hollande, je n'ai pu m'empêcher de ressentir par moments un certain
malaise. En effet, comme ça a toujours été le cas depuis
1985, Howe Gelb est et reste le leader incontesté de Giant
Sand. Le groupe ne joue que ses compositions, et il est à
l'écoute de la fièvre créatrice de Howe qui, sur scène
comme souvent en studio, se laisse guider par les à-coups de son
inspiration à base d'enregistrements au walkman, de sampler à
pédale ou de riff de guitare.
Mais, depuis 1997, de l'eau a coulé sous les ponts. Après
avoir collaboré en tant que section rythmique avec nombre d'artistes
indie-rock US, Joey et John se sont mis à composer leurs propres
morceaux, d'abord pour les Friends of Dean Martinez,
puis pour Spoke et Calexico.
Ils ont maintenant sorti trois albums, Joey a pris de l'assurance en tant
que chanteur et guitariste, et surtout Calexico
mène sa propre carrière qui, en Europe au moins, a actuellement
et ironiquement un profil médiatique et commercial plus élevé
que celui de Giant Sand.
D'où ce malaise que j'ai ressenti à plusieurs moments, de
voir Joey passer un concert entier en tant que bassiste/choriste occasionnel
talentueux, en sachant que le lendemain il sera au milieu de la scène
à interpréter ses chansons, tandis que Howe
serait dans une autre ville pour un concert solo, dans une salle plus petite
avec sa guitare, son piano et son walkman.
On sait, d'après les nombreuses interviews que Howe a données
lors de la sortie de "Chore of enchantment", que Giant
Sand a connu une période difficile depuis la mort de Rainer
en 1997 (panne d'inspiration, éloignement du groupe dû au démarrage
de Calexico, problèmes de labels qui
ont retardé la sortie d'un nouveau disque...), et, comme Howe l'a
dit au magazine Les Inrockuptibles,
Giant Sand se situe à la croisée
des chemins : "Actuellement, j'en suis à essayer de comprendre
si je joue encore dans un groupe, ou simplement avec des musiciens".
GIANT SAND en concert à Paris, La
Maroquinerie, 3 mai 2000. Photos © Cathimini
On préférerait bien sûr que Giant
Sand reste un grand groupe ! Et ce n'est pas un hasard si, en plus
de quinze ans de carrière, la formation de base Gelb/Burns/Convertino
en trio tient depuis près de dix ans maintenant. Les musiciens talentueux
sont légion, mais il serait sûrement difficile d'égaler
cette formation équilibrée et efficace. On ne peut donc qu'espérer
que les trois compères trouveront la formule magique qui permette
à chacun d'entre eux de s'exprimer à la mesure de son talent,
tout en créant ensemble en tant que Giant Sand.
Le fait que le groupe a repris ses tournées régulières
depuis octobre 1999 est plutôt un bon signe !
L'espérience OP8 avec l'album "Slush"
et la tournée européenne qui a suivi a quelque peu montré
une voie possible (compositions partagées, plusieurs chanteurs,...),
et la mort de Rainer a probablement interrompu
un processus intéressant, le meilleur exemple étant peut-être
"Never see it coming", dont la version instrumentale par Calexico sur "The black light" est intéressante,
mais la chanson est sublimée par les paroles et le chant de Howe
sur "Slush".
C'est pourquoi je regrette que le concert d'OP8
que j'ai eu la chance de voir à Reims en octobre 1997 ait été
un concert sans Howe : j'aurais pu mieux me rendre compte de ce que donnait
en concert l'expérience d'un groupe où Howe, Joey et Lisa Germano chantent à tour de rôle.
Je n'étais pas non plus à New-York lors de cette soirée
où Howe Gelb et Calexico
se sont retrouvés en concert le même soir dans la même
ville, et se sont rejoints à un moment sur scène : était-ce
un concert de Giant Sand, ou du Calexico+Howe Gelb ou quelque chose d'autre encore ?
Car c'est sûrement là que se situe une des formules magiques,
pour les concerts en tout cas, la question ne se posant pas de la même
façon pour les enregistrements en studio.
Le 20 octobre 2000, j'aurais la chance d'assister au premier concert de
Giant Sand à Reims, dans le cadre du
festival Octob'rock. Si je peux
me permettre, voici le programme du concert dont je souhaiterais bénéficier
ce soir-là : ouverture du concert par Howe
Gelb en solo (3/4 d'heure), puis une heure de set de Calexico
(pas de problème si c'est en duo, sans mariachis ni basse ni trompettes
: plus ça va, et plus "Spoke" devient mon album préféré
de Calexico. D'ailleurs, "Service and
repair", le prochain single de Calexico
pourait être la suite du morceau "Spokes" de "Spoke"),
puis évidemment un concert de deux heures de Giant
Sand !
Ce n'est peut-être pas la panacée, mais je suis sûr qu'un
jour ou l'autre l'organisateur d'un festival ou les tourneurs respectifs
de Giant Sand, Howe Gelb
et Calexico auront la bonne idée de
nous proposer cette affiche, ce qui m'évitera d'avoir à parcourir
l'Europe de long en large pour voir les trois séparément !
Mais il ne faut pas que je devienne trop exigant en matière de programmation
rêvée pour les concerts : si Jonathan
Richman et Giant Sand n'ont à ma
connaissance pas encore enregistré ensemble comme
je l'ai rêvé, l'organisateur du concert de Nantes le 23
octobre a eu l'excellent idée de mettre au même programme Giant Sand et Jonathan Richman.
Finalement, même si Gelb, Burns et Convertino viennent à Reims
avec mon programme rêvé, il y a fort à parier que je
devrai quand même voyager un peu pour voir des concerts cet automne
!